Bâtiment : l’activité des artisans ralentit encore

L’artisanat du bâtiment connaît une année difficile. Fragilisée dès le début de 2024, l’activité du secteur se contracte nettement au troisième trimestre, confirmant la tendance baissière déjà observée. La construction neuve, segment clé du marché, tire l’ensemble de la filière vers le bas.

(c) Adobe Stock
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Les difficultés des entreprises artisanales du bâtiment s’accentuent. Selon la dernière note de conjoncture de la Capeb, Confédération de l'artisanat et des petites entreprises du bâtiment, publiée le 22 octobre, ce troisième 2024, leur activité accuse globalement un ralentissement de 5%, qui intervient après une baisse de 3% au trimestre précédent. Tous les segments sont touchés, en particulier la construction neuve. Plusieurs facteurs contribuent à cette tendance défavorable, notamment, la hausse des taux d’intérêt, l’inflation, l’incertitude économique ou encore la baisse du pouvoir d’achat des ménages.

Tous les corps de métiers subissent une chute d’activité ce troisième trimestre. La maçonnerie et la couverture-plomberie-chauffage sont les plus affectés avec des évolutions comprises entre -3,5% et -6% sur un an. L’aménagement-décoration-plâtrerie résiste un peu mieux. Les spécialistes du marché du neuf, notamment les artisans de la menuiserie-serrurerie, sont également lourdement impactés, en raison de la baisse des autorisations et des mises en chantier de logements individuels qui ont fléchi, respectivement, de 23,6% et 33,4% sur 12 mois, à fin août 2024.

En parallèle, les travaux d’entretien-amélioration et les rénovations énergétiques affichent un léger ralentissement (-1% et -0,5%, respectivement). La baisse des ventes de logements anciens (de 18,1 % sur un an, à fin août, selon les notaires) pénalise l’activité de rénovation et les investissements dans la performance énergétique. La baisse des taux d’intérêt et des prix de l’immobilier ancien laisse présager un éventuel rebond du marché qui pourrait avoir un effet positif sur la demande en travaux de rénovation, note la Capeb dans sa note de conjoncture. Toutefois, cette projection reste incertaine à court terme.

Santé financière en berne

Signe du ralentissement général de l’activité, les carnets de commandes des petites entreprises du bâtiment se réduisent de six jours sur un an, et ne représentent plus que 71 jours de travail.

Ce contexte économique défavorable se traduit aussi par une détérioration de la situation financière des artisans du bâtiment. Près d’un quart d’entre eux font face à des besoins en trésorerie. Dans le détail, 28% voient leur santé financière se dégrader, tandis que 24% ont besoin de fonds supplémentaires de trésorerie pour une somme moyenne de 29 000 euros, depuis janvier 2024. Le solde d’opinion sur la trésorerie, qui oscillait entre -10 et -15 depuis 2022, tombe à -22 points. Cette tendance s’explique par la diminution d’activité touchant 55% des professionnels et l’allongement des délais de paiement qui en affecte 45%. La combinaison de ces deux facteurs menace la pérennité des entreprises et se répercute directement sur l’emploi-salarié : pour le second semestre 2024, 10 % des entreprises artisanales déclaraient envisager des licenciements ou des non-renouvellements de contrats, contre 8 % des embauches supplémentaires .

L’ensemble du territoire impacté

Cette dégradation s'observe sur l’ensemble du territoire. La situation est particulièrement inquiétante en Ile-de-France, où l’activité décroche de -7%, (contre seulement -1,5 % au deuxième trimestre) et en Centre-Val de Loire (-6%). Une série de régions affichent un ralentissement en deçà de la tendance nationale, comme en PACA-Corse (-3,5%) ou, à - 4 %, en Bretagne, Pays-de-la-Loire, Nouvelle-Aquitaine, Hauts de France, Normandie et Bourgogne-Franche-Comté.

Malgré la désinflation progressive et l’assouplissement monétaire, le secteur de l’artisanat du bâtiment reste fragile. Les mesures budgétaires prévues, comme la réduction de l’enveloppe allouée au dispositif MaPrimeRénov’, notamment, pourraient retarder son redémarrage. Face à cette crise, la Capeb appelle à des actions urgentes pour relancer l’activité et sécuriser l’emploi, afin d’éviter une dégradation encore plus alarmante dans les prochains mois. Alors que les besoins en rénovation énergétique sont grandissants, les entreprises du bâtiment ont du mal à se développer dans ce domaine en raison des difficultés économiques.

AÏcha BAGHDAD et B.L