Délais de paiement : la crise sanitaire a interrompu la baisse amorcée les années précédentes
L’impact de la pandémie sur les délais de paiement continue de se faire sentir. Le niveau des retards de paiement n’a pas toujours pas retrouvé celui d’avant la crise sanitaire.
Établi sur la base des données de la Banque de France, le dernier rapport de l’Observatoire des délais de paiement fait état d’une certaine stabilisation des délais de paiement en 2020, comparé à 2019. Ils sont restés stables à 43 jours de chiffres d’affaires pour les délais clients (contre 43,4 en 2019) et 49,4 jours d’achats pour les délais fournisseurs (contre 49,3 en 2019). Mais les conséquences économiques de la crise sanitaire, qui a interrompu la baisse des délais amorcée depuis 2018 (et même 2017 pour les délais fournisseurs), continuent de se faire sentir. Le niveau des retards de paiement n’a en effet pas encore retrouvé celui d’avant la pandémie : il était de 12,1 jours en moyenne fin 2021, soit un jour de plus qu’en 2019. Les difficultés d’approvisionnement et la hausse des prix des matériaux et des matières premières restent une source de tensions.
Les grandes entreprises pointées du doigt
Les comportements de paiement ne sont pas encore revenus à la normale, et le rapport pointe notamment le fait que celui des grandes entreprises reste particulièrement préoccupant. C’est la seule catégorie d’entreprises pour laquelle on observe une augmentation constante des délais de paiement. Leur délai moyen de paiements fournisseurs n’a ainsi cessé d’augmenter depuis 2019, et seules 41% d’entre elles paient à l’heure, contre 75% des PME. Les délais de paiement des entreprises de plus de 1 000 salariés sont supérieurs de cinq jours, en moyenne, à ceux des entreprises de moins de 200 salariés.
Une première raison tient « à des délais de réception des factures parfois très importants, dans certains cas même après la date à laquelle elles étaient dues », expose le rapport. Les autres causes de retard s’expliquent par « des processus de validation complexes, voire inadaptés, et des fréquences de campagnes de règlement trop faibles ». Et de conclure : « pourvu qu’elles en aient la volonté, les grandes entreprises peuvent remédier à une large partie du problème en adaptant leurs processus de contrôle, traitement et paiement des factures, comme certaines le font d’ailleurs, et comme le font également avec succès les services de l’État ».
Les services de l’État consolident leurs acquis
Dans un contexte général de modernisation et de rationalisation des processus de la commande publique, le délai global de paiement des services de l’État est resté stable en 2021 par rapport à 2020 (17,5 jours, soit + 0,3 jour), de même que le taux de paiement en 30 jours (87%). Et ce, en dépit d’une forte hausse (7%) des demandes de paiement l’an passé.
Du côté des collectivités locales, les délais de paiement ont enregistré une baisse globale entre 2020 et 2021, excepté pour les régions. Elle est de l’ordre d’une demi-journée pour les communes (à 18,7 jours) et les groupements à fiscalité propre (21,3 jours), et atteint 1,4 jour pour les départements (à 18,9 jours). La situation des établissements publics de santé demeure en revanche préoccupante : 40 % d’entre eux continuent de payer au-delà du délai réglementaire.
Halte à la surenchère réglementaire
Dans son rapport, l’Observatoire fait également état de « son hostilité constante à la surenchère réglementaire qui ne conduit souvent, en pratique, qu’à une accumulation de mesures inefficaces ». Il s’interroge, en particulier, sur l’attestation demandée aux commissaires aux comptes concernant les délais de paiement fournisseurs et clients des sociétés dont ils certifient les comptes : « Les moyens et le temps à consacrer à l’examen et au traitement de la masse d’informations à collecter auprès de la société et de ses filiales paraissent être sans commune mesure avec les procédures de certification de comptes dans laquelle cette vérification de factures doit s’inscrire ».
L’Observatoire appelle par ailleurs à la création d’une base de données des délais de paiement des collectivités territoriales, accessible gratuitement sur le site du ministère des Finances. « Cela permettra aux entreprises de s’informer avant de répondre à un appel d’offre public, et pourrait discipliner les comportements de paiement des collectivités elles-mêmes. »
Délais de paiement : 1 272 établissements contrôlés, en 2021
En 2021, la Direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes (DGCCRF) a procédé au contrôle du respect de la législation relative aux délais de paiement dans 1 272 établissements, dont 17 entreprises publiques. Elle a notamment ciblé les entreprises ayant bénéficié d’un prêt garanti par l’État (PGE), car l’octroi de ce prêt était lié à l’engagement de respecter les délais de paiement (610 entreprises bénéficiaires PGE ont ainsi été contrôlées). Le taux d’anomalies relevé lors de l’ensemble des contrôles atteint 32%, en légère augmentation par rapport à 2020. Les sanctions administratives prononcées ont représenté environ 40,7 millions d’euros d’amendes, en 2021. Les entreprises sanctionnées le sont le plus souvent pour des manquements à l’égard des plafonds applicables en matière de délais de paiement et pour des défaillances en matière d’organisation comptable.
M.L.