L’entreprise et les salariés
Revue de récentes décisions de la Cour de cassation, en matière de droit du travail.
Licenciement : faute grave
Ne constitue pas une faute grave rendant impossible le maintien du contrat de travail d’un directeur d’association la suppression et le transfert de messages électroniques professionnels, dès lors que l’association n’avait pas rédigé de charte informatique pour réglementer le fonctionnement et l’usage des outils informatiques mis à disposition des salariés, dans le cadre de leur travail, que la très grande majorité des courriels avait transité par la boîte de la secrétaire de direction qui en conservait trace. Ce que n’ignoraient ni le salarié, ni la représentante légale de l’association, et que celle-ci n’alléguait aucun préjudice. (Cass soc., 7 décembre 2022, pourvoi no 21-11206)
Si l'irrégularité de la situation d'un travailleur étranger constitue nécessairement une cause objective justifiant la rupture de son contrat de travail exclusive de l'application des dispositions relatives aux licenciements et de l'allocation de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, elle n'est pas constitutive en soi d'une faute grave. (Cass soc., 23 novembre 2022, pourvoi n° 21-12125)
PSE : modification du contrat de travail
Une modification de contrat de travail intervenue dans le cadre d'un projet de réorganisation de l’entreprise, ayant donné lieu à l'élaboration d'un accord collectif portant plan de sauvegarde de l'emploi (PSE), ne constitue pas un acte subséquent à cet accord. Les salariés ayant tacitement accepté cette modification ne sont donc pas fondés à se prévaloir du défaut de validité de l'accord collectif déterminant le contenu de ce plan pour obtenir la nullité de leur contrat de travail. (Cass soc., 23 novembre 2022, pourvoi n° 21-16162)
Santé au travail : logement de fonction
Le logement attribué à titre gratuit à un salarié pour l’exercice de ses fonctions, qui est l’accessoire du contrat de travail et dont il bénéficie dans sa vie personnelle, ne peut lui être retiré ou donner lieu au versement d’un loyer, pendant une période de suspension du contrat de travail pour maladie. Le défaut de fourniture de logement de fonction pendant l’arrêt de travail constitue donc un manquement aux obligations de l’employeur, dont la cour d’appel doit apprécier la gravité. (Cass soc., 14 décembre 2022, pourvoi no 21-15685)
Durée du travail
Il résulte de l’article L 3121-35 al. 1 du Code du travail que le seul constat du dépassement de la durée maximale de travail ouvre droit à réparation. (Cass soc., 14 décembre 2022, pourvoi no 21-21411)
Harcèlement au travail
Une cour d'appel peut débouter une salariée de sa demande au titre d'un harcèlement sexuel dès lors qu'elle constate que le dirigeant de la société a émis une remarque inappropriée sur son physique et a retenu que, si de tels propos n'étaient pas admissibles, ils ne faisaient pas ressortir chez leur auteur la volonté d'obtenir des faveurs de nature sexuelle. (Cass soc., 23 novembre 2022, pourvoi n° 21-18726)
L'obligation de prévention du harcèlement moral est distincte de la prohibition des agissements de harcèlement moral et ne se confond pas avec elle. Une cour d'appel ne peut débouter le salarié de sa demande relative à la prévention d'actes de harcèlement moral au motif que l'existence d'un harcèlement n'est pas démontrée, alors que l'intéressé faisait valoir, dans ses conclusions, qu'il avait dénoncé auprès de son employeur des agissements de harcèlement, sans réaction de celui-ci, et avait formé devant le juge une demande de dommages-intérêts distincte pour violation de l'obligation de prévention du harcèlement. (Cass soc., 23 novembre 2022, pourvoi n° 21-18951)
Licenciement : données GPS
Un employeur peut utiliser des données de kilométrage relevées par GPS sur le véhicule de fonction d’un délégué médical pour le licencier (CEDH, 13 décembre 2022, requête n°26968/16)
François TAQUET, avocat,
spécialiste en droit du travail et protection sociale