La crise a fait évoluer les usages et les équipements numériques des Français
Les résultats du Baromètre du numérique 2020 ont été publiés début juillet. Ils permettent, notamment, de mesurer l’impact de la crise sanitaire sur la diffusion des équipements et des usages numériques dans la société française.
Pour sa vingtième édition, le Baromètre du numérique* témoigne de l’influence de la pandémie et des périodes de confinement sur l’adoption des technologies numériques par les Français. Sans surprise, le taux d’utilisation de tous les équipements a nettement augmenté en l’espace d’un an. La part des individus utilisant un ordinateur est ainsi passée de 76 à 88%, de 77 à 84% pour les smartphones, de 59 à 71% pour le téléphone fixe, le taux d’utilisation des tablettes de 41 à à 58% et celui des enceintes connectées de 11 à 24%.
Diversification des usages et « phénomène de rattrapage »
Avec le télétravail, le suivi scolaire en ligne, la consultation médicale à distance ou les achats et ventes en ligne, les usages se sont diversifiés. La crise sanitaire a ainsi intensifié le recours au commerce en ligne : 76% des répondants déclarent acheter des biens sur Internet (en hausse de 14% par rapport à 2019), dont 48% au moins une fois par mois, et 44% indiquent également vendre des biens en ligne. On observe « un phénomène de rattrapage des usages d’Internet de la part de ceux qui utilisaient le moins le numérique », à savoir « les personnes de plus de 60 ans et les personnes non diplômées », a expliqué Michel Schmitt, membre du Conseil général de l’Economie, lors de la présentation de l’enquête à la presse. Autre tendance remarquable, selon lui : « les jeunes diminuent leur usage des réseaux sociaux au profit des plus âgés, la bascule se fait autour de 40 ans ». Quant au temps passé devant les écrans, « il est quasi stable, même si les pratiques varient beaucoup en fonction de l’âge, les plus âgés passent plus de temps devant la télévision et les plus jeunes à regarder des vidéos en ligne ».
« Une forme de résistance de la presse papier »
Pour la première fois cette année, l’enquête prévoyait des questions sur la presse numérique. Il en ressort que « les pratiques de lecture de la presse papier et numérique sont additives, il n’y a pas nécessairement de substitution entre la presse papier et la presse numérique, les usagers font les deux », a relevé Maya Bacache, membre du collège de l’ARCEP, autorité de régulation qui est notamment en charge de la distribution de la presse en France. « Il y a une forme de résistance de la presse papier. » Si 76% des répondants ont déclaré lire la presse, 43% lisent à la fois de la presse papier et numérique, 20% uniquement de la presse papier et 13% exclusivement de la presse numérique. Par ailleurs, 17% disent lire des livres numériques.
Réduire l’impact environnemental des terminaux numériques
L’enquête comporte un certain nombre de questions sur le renouvellement des terminaux, qui sont les principaux responsables de l’empreinte environnementale du numérique. Il en ressort que le taux d’équipement téléphonique, déjà élevé, a encore progressé en 2020 : 84% des répondants ont indiqué détenir un smartphone, alors que les téléphones mobiles « classiques » ne représentent plus que 10% de l’ensemble des téléphones mobiles. Quant à l’équipement en téléphone fixe, il a cessé de baisser pour la première fois depuis 2013, et même légèrement augmenté l’an passé.
Plus en détail, 84% des répondants ont déclaré détenir leur smartphone depuis trois ans au moins, et 17% qu’il s’agit d’un smartphone de seconde main, d’occasion ou reconditionné. « Ce qui est peu, il y a des marges de manœuvre », a souligné Maya Bacache, même si la filière du recyclage et du reconditionnement des téléphones est encore « peu développée », de même que la filière des smartphones éco-responsables, alors que 60% des répondants se disent prêts à en acheter un de ce type, sous réserve, pour la moitié d’entre eux, que le prix reste raisonnable. Enfin, dans 37% des cas, les smartphones sont renouvelés parce qu’ils ne fonctionnent plus correctement. Lutter contre leur obsolescence programmée pour augmenter leur durée d’usage constitue donc « un levier important pour réduire leur empreinte environnementale », a pointé Maya Bacache.
Les défis de l’inclusion numérique pour tous
Reste que si les usages et les taux d’équipement progressent, un certain nombre de Français demeurent très éloignés du numérique. En termes de compétences, 35 % des répondants disent éprouver au moins une forme de difficulté qui les empêchent d’utiliser pleinement les outils numériques et Internet. Et quand ils n’arrivent pas à effectuer une démarche en ligne, la majorité d’entre eux (56%) préfèrent qu’on leur explique comment le faire plutôt qu’on le fasse à leur place.
Sur ce terrain, « l’âge est important, mais le premier déterminant est la catégorie socio-professionnelle et le niveau d’études », a rappelé le secrétaire d’État chargé de la Transition numérique et des communications électroniques, Cédric O, lors de la restitution de cette étude au ministère de l’Économie, des Finances et de la Relance. Autre enseignement tiré des résultats de ce baromètre : « la volonté de la majorité des personnes en difficulté face au numérique non pas que l’on fasse à leur place, mais qu’on leur apprenne comment faire », a-t-il relevé. Or, c’est précisément l’objet de la mission confiée aux médiateurs du numérique, le programme financé par son ministère et en cours de déploiement dans toute la France. Enfin, sur le plan environnemental, le secrétaire d’État a notamment pointé « la nécessité d’allonger la durée de vie des terminaux portables et de développer des filières de recyclage et de reconditionnement ».
*Réalisé par le Centre de recherche pour l'étude et l’observation des conditions de vie (Credoc), pour le Conseil général de l'économie (CGE), l’Autorité de régulation des communications électroniques, des postes et de la distribution de la presse (Arcep) et l’Agence nationale de la Cohésion des Territoires (ANCT)