Agriculture
Le monde agricole dans l’expectative des décisions du gouvernement
Souveraineté alimentaire, transition écologique, compétitivité et transmission des exploitations agricoles… La FNSEA, Fédération nationale des syndicats d’exploitants agricoles, exhorte le gouvernement à fixer des objectifs et accorder des moyens pour accompagner les agriculteurs.
« Il faut arrêter les discours et les déclarations, il faut passer aux actes et se mettre au travail », a déclaré le président de La Fédération nationale des syndicats d’exploitants agricoles (FNSEA), Arnaud Rousseau, lors de sa conférence de rentrée, le 31 août dernier. « Nous attendons que l’on nous donne des chiffres sur le niveau de production, le niveau des importations, (…) nous attendons du gouvernement de la cohérence entre les objectifs de décarbonation de l’agriculture et les moyens de le faire, (…), nous attendons des objectifs, une stratégie et des moyens (…), une vision, des perspectives et un accompagnement ».
La transition écologique est « un défi auquel nous voulons participer »
La transition écologique est un objectif sur lequel « nous sommes très mobilisés », a poursuivi le président de la FNSEA, « c’est un défi auquel nous voulons participer ». La fédération agricole s’apprête à rencontrer de nouveau le secrétariat d’État à la planification écologique pour discuter de la façon dont l’agriculture peut être un acteur de la décarbonation de l’économie, de la restauration de la biodiversité, de la production de biomasse, de développement du photovoltaïque, du renforcement des sols… « Nous avons besoin de connaître les objectifs, et de cohérence entre les actions et les moyens mis à disposition pour atteindre ces objectifs ». Un appel lancé quelques jours avant le rendez-vous fixé entre la FNSEA avec le chef de l’État, Emmanuel Macron, le 7 septembre.
Enrayer le déclin de la production pour favoriser la souveraineté alimentaire
Sur le terrain de la souveraineté alimentaire française, « le volontarisme politique ne se traduit pas dans les faits », a-t-il poursuivi, en pointant les différentes déclarations et annonces faites par le gouvernement et restées sans suite, telles que le plan de relance de l’élevage. Et ce, alors que la France continue de perdre des capacités de production dans l’élevage (viande et produits laitiers) et les cultures spécialisées (fruits et légumes). Aussi l’objectif de la FNSEA en cette rentrée vise-t-il à « enrayer le déclin de la production agricole française ». Pour ce faire, « nous voulons construire des actions très concrètes avec nos partenaires et avec le gouvernement ». D’autant plus que « nous pensons que la souveraineté alimentaire française est une des solutions de la transition écologique, avec des produits de qualité et de proximité ».
Hausse des prix de l’alimentation et juste rémunération des agriculteurs
« Nous avons conscience des difficultés de certains de nos compatriotes à se nourrir du fait de l’augmentation des prix de l’alimentation», observée en France depuis plusieurs mois déjà, et qui, couplée à l’inflation, entraîne une baisse de la consommation des ménages et « des difficultés à écouler nos produits », a-t-il expliqué. La FNSEA avait d’ailleurs suggéré l’idée d’un chèque alimentaire pour les personnes en difficulté, mais elle n’a pas été retenue par le gouvernement. « Nous nous sommes battus contre la déflation continue des prix dans l’agriculture ces dernières années, et contre la baisse des revenus des agriculteurs. Le juste prix de l’alimentation c’est la juste rémunération de ceux qui la produisent. » Or, cette dernière est un des facteurs clés de l’attractivité du secteur agricole à l’heure où près de 100 000 chefs d’exploitation vont bientôt partir à la retraite. Autre sujet sensible : les discussions entre les distributeurs et l’industrie agroalimentaire. « On ne veut pas retomber dans la guerre des prix et des marges », a-t-il déclaré, et « la précarité alimentaire ne se réglera pas avec une guerre des prix ».
Dans l’attente du projet de loi d’orientation pour l’agriculture
Le secteur est notamment en attente des arbitrages du gouvernement sur le Pacte et la loi d’orientation et d’avenir agricoles. À l’issue de la concertation lancée fin 2022, les groupes de travail ont remis leurs rapports et leurs propositions au ministre de l’Agriculture et de la Souveraineté alimentaire, Marc Fesneau, en juin dernier. En cette rentrée, le texte du projet de loi, qui va notamment traiter de sujets relatifs au foncier, à l’installation des agriculteurs et la fiscalité de la transmission des exploitations, et à la transition écologique, n’a toujours pas été rendu public. Il pourrait être examiné par le Parlement « en décembre prochain », a annoncé le président de la FNSEA.
Miren LARTIGUE
Les agriculteurs inquiets face aux attaques contre l’agriculture
La conférence de rentrée de la FNSEA a été l’occasion de dresser un état des lieux à la fin de l’été, qui est une période d’activité agricole intense. Le bilan est plutôt satisfaisant cette année, même si les conditions climatiques ont contribué à couper la France en deux, entre le nord et le sud. « Après une année 2022 plutôt correcte, l’année 2023 est plus aléatoire en termes de récoltes », a expliqué le secrétaire général de la FNSEA, Hervé Lapie. « Sur la partie fourrages, la récolte a été correcte et a permis la reconstitution des stocks », mais on peut notamment observer « une pression assez forte sur le plan viticole ». Mais c’est sur les prix que la tension est actuellement la plus forte, du fait du poids des charges qui ont explosé en 2023 dans les exploitations (environ 20% d’augmentation sur la dernière année), contribuant à une baisse de la compétitivité.
Enfin, l’été a été marqué par des tensions sur l’accès à l’eau et le stockage de l’eau, avec des conflits autour des mégabassines, notamment. Sur le terrain de la transition écologique, de façon plus générale, « les agriculteurs restent inquiets face aux attaques contre l’agriculture, et contre les agriculteurs eux-mêmes », et ils s’interrogent « sur la place des agriculteurs dans la société », a tenu à souligner le numéro deux de la FNSEA. « On ne peut pas être dans l’invective » à leur encontre, mais au contraire « accompagner les agriculteurs à faire évoluer leur stratégie d’exploitation agricole » avec la transition de la société.
M.L.