Economie

Défaillances d’entreprises : une hausse confirmée, mais plus lente

Le net rebond des défaillances d’entreprises en France se confirme, en ce début d’année, à un niveau inédit depuis neuf ans, avec plus de 17 000 procédures collectives ouvertes. Certains secteurs sont particulièrement vulnérables, comme l’immobilier et la construction.


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Globalement, la situation continue à se dégrader, mais à un rythme plus lent. Selon les derniers chiffres du groupe Altares, spécialiste des données sur les entreprises, dévoilés le 11 avril, ce premier trimestre confirme la tendance préoccupante observée en 2023 : les entreprises françaises continuent de souffrir et les défaillances se multiplient. Entre janvier et mars, pas moins de 17 088 procédures (sauvegarde, redressement judiciaire, liquidation judiciaire directe) ont été enregistrées, atteignant ainsi leur plus haut niveau depuis 2015 (18 134). «La barre symbolique des 60 000 défauts sur 12 mois a été franchie en février, pour la première fois depuis l'été 2016», note Thierry Millon, directeur des études Altares. Inflation, hausse des taux d’intérêt, remboursements liés à la pandémie de Covid (PGE, dette sociale et fiscale), faible croissance, accès au financement plus difficile pèsent sur l’activité et la trésorerie des entreprises. Cependant, la tendance montre un ralentissement de la hausse des défaillances, avec une augmentation de 19,4%, comparativement à celle de plus de 42% observée au premier trimestre 2023.

Les jeunes entreprises résistent

Sans surprise, les TPE demeurent, et de loin, les plus fragilisées, représentant encore 92% du total des défaillances. Mais la situation s’avère particulièrement préoccupante pour les grosses PME (entre 50 et 200 salariés) : le nombre de procédures ouvertes à leur encontre a crû de près de 60 %, sur un an. Avec 154 défaillances enregistrées, ce segment atteint son plus haut niveau depuis plus de 10 ans. Cette aggravation menacerait quelque 59 000 emplois, selon Altares. Elle met en lumière la fragilité de ces structures face aux multiples défis économiques auxquels elles sont confrontées.

Malgré un contexte économique difficile, les jeunes entreprises ayant vu le jour depuis 2022 résistent mieux que la moyenne : 1 610 d’entre elles ont fait défaut au premier trimestre 2024, soit une hausse de «seulement» 5,9% par rapport à la même période de 2023. Ce constat s’explique probablement par une absence de dettes liées à la crise sanitaire. Cependant, disposant de moins de fonds propres que leurs aînées, elles sont très majoritairement, placées en liquidation judiciaire directe, pointe l’étude. Les entreprise de 11 à 15 ans d’existence enregistrent également une tendance inférieure à la moyenne, à +13%.

Des lueurs d’espoir pour certains secteurs ?

Si certains secteurs d’activité continuent de souffrir, d’autres montrent des signes de reprise progressive. Après des mois de morosité, les services à la personne, la restauration et le commerce alimentaire semblent se redresser. Ainsi, la boulangerie, qui avait vu le nombre de ses défaillances presque doubler en 2022, affiche une baisse de 12% des procédures ouvertes au cours des trois premiers mois de 2024. La boucherie, aussi connait une amélioration (-25% des défaillances). Dans la restauration, après deux années éprouvantes, «le service à table», par exemple, voit ses défaillances croître de 9% (vs +110 % début 2022 ou +50 % en 2023). Les centres ou clubs de sport, et, côté B2B, la mécanique industrielle et les entreprises de programmation informatique tirent plus nettement leur épingle du jeu avec des baisses respectives de 27%, 17% et 13%.

En revanche, l’habillement demeure à la peine. Plus encore, l’immobilier (le nombre de défaillances d’agences immobilières a quasiment doublé ce trimestre), mais aussi la construction (+31%) et l’équipement du foyer (+62%) restent dans le rouge, impactés par la crise du logement.

Des disparités régionales

En régions, des disparités importantes sont constatées. La Corse (+39 %) et l’Ile-de-France, sensible aux difficultés de l’immobilier (+ 30%, avec 4 000 procédures) sont les plus touchées ce premier trimestre, avec des niveaux records. À l’inverse, deux régions se démarquent par leur résistance relative : les Hauts-de-France avec des défaillances en hausse de 6 % (mais à +21 % pour l’Oise) et la Nouvelle Aquitaine à + 10% (mais avec une dégradation de 34 % pour la Charente-Maritime et +25 % pour la Gironde).

Pour l’ensemble de l’année, Altares prévoit sur une hausse globale de plus de 10 % des défaillances, soit 64 000 procédures collectives.


AÏcha BAGHDAD et B.L