Territoires

Faute de ressources en ingénierie, les petites communes peinent à concrétiser leurs projets

Un récent rapport sénatorial émet plusieurs recommandations afin d’aider les petites communes, confrontées à un cruel manque de moyens d’ingénierie, à mener à bien les projets qui permettraient de mieux répondre aux attentes des habitants.






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« Les petites communes, principales victimes du désengagement de l’Etat territorial. » Tel est le constat dressé par le rapport d’information relatif à l’ingénierie des petites communes, publié mi-juin par la délégation aux Collectivités territoriales et à la Décentralisation du Sénat. Selon les rapporteurs, ce sont les plus petites communes de France (moins de 2 000 habitants) qui ont été les plus touchées par le désengagement de l’État de l’ingénierie de proximité depuis une vingtaine d’années. « La suppression brutale, en 2014, de l’assistance technique de l’État pour des raisons de solidarité et d’aménagement du territoire (ATESAT) a alimenté un sentiment d’abandon pour les communes dépourvues de services administratifs suffisamment étoffés », explique le rapport. Et « dans ce désert d’ingénierie », le déploiement de dispositifs nationaux « n’a que partiellement comblé ces carences ».

Des dispositifs qui ne permettent pas de combler l’insuffisance des moyens d’ingénierie

À commencer par l’offre d’ingénierie « sur mesure » proposée par l’Agence nationale pour la cohésion des territoires (ANCT) : « l’enveloppe financière qui y est réellement consacrée reste modeste (5,8 M€ en 2021 et 6,7 M€ en 2022) ». Certes, certains conseils départementaux se sont attachés à combler ce déficit d’accompagnement des petites communes en leur proposant des prestations gratuites ou payantes. Mais « la structuration de cette ingénierie territoriale reste disparate et gagnerait à être affermie ».

Autre dispositif national destiné à pallier cette insuffisance de moyens d’ingénierie : le programme « Villages d’avenir », annoncé en juin 2023 et piloté par l’ANCT. Ce dernier vise à apporter un accompagnement personnalisé pendant 12 à 18 mois à des communes de moins de 3 500 habitants (sélectionnées par appels à projets). Or, ce soutien en ingénierie est « un complément nécessaire mais insuffisant pour les petites communes », estiment les rapporteurs. « Si le programme n’est pas dépourvu d’atouts, certains points de vigilance doivent être mis en exergue : l’absence d’enveloppe financière dédiée au financement des projets peut engendrer des désillusions si la mobilisation des financeurs n’est pas à la hauteur des attentes ; l’assistance à maîtrise d’ouvrage des communes dans la phase de mise en œuvre opérationnelle doit être plus clairement définie ; la durée d’accompagnement, de 12 à 18 mois, est inférieure au temps de maturation des projets complexes et structurants. »

Améliorer la coordination des différents dispositifs

Les rapporteurs proposent trois orientations pour remédier à cette situation. Ils préconisent tout d’abord d’améliorer la coordination des dispositifs d’ingénierie, afin de mieux orienter les élus locaux, dans une logique de « guichet unique », accessible dans chaque département. Sur ce terrain, « les préfets doivent jouer pleinement leur rôle d’orientation des élus », en s’assurant notamment du bon fonctionnement des comités locaux de la cohésion territoriale (CLCT), « dont le bilan est aujourd’hui inégal », soulignent-ils. Quant à l’ANCT, elle doit « en particulier assurer la cohérence de ses interventions avec les autres opérateurs nationaux ». Enfin, pour mieux faire connaître ces dispositifs d’accompagnement, il conviendrait de faire un effort de sensibilisation à destination des élus des plus petites communes.

Un fonds national dédié à l’ingénierie des petites communes

Deuxième recommandation : pérenniser les financements pour favoriser la planification des projets des petites communes. Pour ce faire, les rapporteurs préconisent de créer un fonds national dédié à l’ingénierie des petites communes, « qui pourrait être abondé par une cotisation sur l’investissement des collectivités à hauteur de 0,1 % », et d’intégrer les dépenses en « ingénierie d’animation » parmi les dépenses éligibles à la dotation d’équipement des territoires ruraux (DETR).

Structurer des réseaux d’ingénierie solides

Enfin, les rapporteurs suggèrent de « renoncer au caractère systématique des appels à projets » et de « structurer des réseaux d’ingénierie solides » qui assurent la diffusion continue de bonnes pratiques – tels que le réseau Bretagne rurale et urbaine pour un développement durable, qui met en relation 270 collectivités issues de quatre départements pour échanger sur leurs bonnes pratiques. Autre piste à explorer : l’ingénierie mutualisée, financée sur fonds publics et privés, comme c’est le cas pour l’initiative « 1 000 cafés » portée par le groupe SOS, afin d’ouvrir, de maintenir et de soutenir des cafés multi-services (presse, dépôt de pain, petite épicerie, relais colis…) dans les petites communes.