Vers une meilleure indemnisation des désordres en cas de sécheresse
Face à l’intensification du dérèglement climatique, le régime d’indemnisation des catastrophes naturelles a été progressivement adapté en assouplissant les critères de reconnaissance des phénomènes de sécheresses et en renforçant les mesures de prévention. Dernièrement, dans une circulaire interministérielle, le gouvernement a rédigé un véritable mode d’emploi de l’indemnisation, avec pour objectif de « rendre les textes plus accessibles et compréhensibles ».
De récentes modifications d’ampleur
Le régime juridique de l’indemnisation en cas de catastrophe naturelles a été sensiblement remanié ces dernières années avec de nombreux textes. D’abord, une loi du 28 décembre 2021 a entrepris de faciliter les démarches de reconnaissance de l’état de catastrophe naturelle. Elle a permis l’amélioration et l’accélération de l’indemnisation. Une partie spécifique concernait le phénomène de « retrait‑gonflement » des sols argileux, en cas de sécheresse. Parmi la kyrielle de mesures sur ce sujet, le délai de prescription pour exiger le règlement de l’indemnité est passé de deux à cinq ans. Un décret du 30 décembre 2022 a précisé l’ensemble de ces mesures législatives.
Une ordonnance du 8 février 2023 était spécifiquement consacrée au phénomène de « retrait‑gonflement », qui fissure et fragilise les maisons. Entre autres améliorations, ce texte a, par exemple, également prévu de prendre en compte, parmi les critères ouvrant droit à la garantie, les dommages causés par la succession anormale d’évènements de sécheresse d’ampleur significative (et non plus uniquement « exceptionnelle »). Toutefois, dans le même temps, l’ordonnance a limité la garantie aux dommages susceptibles d’affecter la solidité du bâti ou d’entraver l’usage normal du bâtiment. De même, depuis cette ordonnance, il existe une obligation d’affectation de l’indemnité perçue à la réalisation des travaux réparatoires. Un décret du 5 février 2024 a précisé l’ensemble de ces dispositions.
Face à cette avalanche de nouveaux textes d’une grande importance, une clarification s’imposait. C’est désormais chose faite avec cette circulaire du 29 avril 2024, publiée le 6 mai dernier, qui peut être vue comme un véritable mode d’emploi pour les communes et assurés concernés.
Assouplissement des critères de reconnaissance en cas de sécheresse
La circulaire du 29 avril 2024 à destination des préfets (qui reçoivent les demandes de reconnaissance de l’état de catastrophe naturelle envoyées par les communes) prévoit une révision des critères quantitatifs permettant de qualifier de catastrophe naturelle une sécheresse, afin de mieux prendre en compte l’évolution de la nature des sécheresses.
Ainsi, pour être qualifié d'anormal, un épisode de sécheresse géotechnique (retrait-gonflement des argiles) annuel doit être « caractérisé par un indice d'humidité des sols superficiel minimum de l'année présentant une période de retour supérieure ou égale à 10 ans ».
De même, doit également être pris en compte une « succession anormale d'épisodes de sécheresse annuels significatifs » alors même qu’aucun de ces épisodes, pris indépendamment, ne dépasse le seuil de « l’anormalité ». Le seuil de reconnaissance d'une « succession anormale d'épisodes de sécheresse significatifs » est atteint lorsque deux conditions cumulatives sont réunies sur la même maille géographique* : lorsque l'indice d'humidité des sols superficiels mensuel minimum présente une période de retour supérieure ou égale à cinq ans au cours de l'année étudiée et au cours d'au moins deux des quatre années précédant l'année étudiée.
De même, la circulaire prévoit la possibilité d’intégrer la situation hydrométéorologique des communes limitrophes aux communes ayant demandée une reconnaissance de l’état de catastrophe naturelle, afin de limiter les effets de bord des critères. Concrètement, une commune qui ne réunit pas les critères de sécheresse annuelle anormale ni de succession anormale d’épisodes de sécheresse significatifs pourra, sous conditions, être reconnue en état de catastrophe naturelle dès lors qu’elle est limitrophe d’une commune qui réunit l’un de ces deux critères.
Selon le gouvernement, ces améliorations, attendues par de nombreux élus et sinistrés, devraient permettre d’augmenter le nombre de communes éligibles à la reconnaissance de l’état de catastrophe naturelle par rapport à la situation actuelle. Les études d’impact réalisées par Météo-France et la Caisse centrale de réassurance anticipent une hausse moyenne du nombre de communes reconnues annuellement d’environ 17%, par rapport à la situation actuelle, précise un communiqué du ministère de l’Ecologie.
* Une maille recouvre une zone de 64 km2. La France métropolitaine est couverte par 8 981 mailles géographiques. À chacune d’elles correspond un indice d'humidité des sols différent.