Droit
L’entreprise et les salariés
Revue de récentes décisions de la Cour de cassation, en matière de droit du travail.
Licenciements
Le caractère illicite du motif du licenciement prononcé, même en partie, en raison de l’exercice, par le salarié, de sa liberté d’expression, liberté fondamentale, entraîne à lui seul la nullité du licenciement. En l’espèce, la cour d’appel, ayant constaté que le licenciement était, en partie, fondé sur le comportement critique du salarié et son refus d’accepter la politique de l’entreprise basée sur le partage de la valeur « fun and pro », mais aussi l’incitation à divers excès, qui participent de sa liberté d’expression et d’opinion, sans qu’un abus dans l’exercice de cette liberté ne soit caractérisé, ne pouvait le débouter de sa demande d’annulation du licenciement. (Cass soc., 9 novembre 2022, pourvoi no 21-15208)
L'employeur qui notifie à son salarié étranger en situation d'emploi illicite son licenciement pour défaut de titre de séjour, sans invoquer, à l'appui de ce licenciement, de faute grave, est redevable du salaire échu pour toute la période antérieure à la rupture du contrat de travail. (Cass soc., 23 novembre 2022, pourvoi n° 21-12125)
Santé au travail
Constitue une visite médicale de reprise l’examen médical du salarié passé à l’initiative de l’employeur, qui fait suite à un premier examen à l’issue duquel, en l’espèce, la salariée avait été déclarée inapte à son poste par le médecin du travail. Par conséquent, la cour d’appel ne pouvait débouter celle-ci de sa demande de reprise du versement du salaire, dans le délai d’un mois à compter de cet examen médical. (Cass soc.,16 novembre 2022, pourvoi n° 21-16629)
L’obligation de reclassement qui pèse sur l’employeur préalablement à un licenciement pour inaptitude physique ne s’étend pas à d’autres entreprises qui ne relèvent pas d’un même groupe. Par conséquent, une cour d’appel ne peut dire le licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse au motif que l’employeur, qui a pris l’initiative de rechercher des postes auprès de sociétés extérieures au groupe, n’a pas proposé au salarié les postes disponibles au sein de celles-ci et a ainsi manqué de loyauté dans la recherche d’un poste de reclassement. (Cass soc., 16 novembre 2022, pourvoi n° 21-12809)
Salariés protégés
Le licenciement ne peut être rétracté par l'employeur qu'avec l'accord du salarié, peu important que la rétractation ait été faite à la demande de l'inspecteur du travail d'annuler la procédure de licenciement engagée et de respecter le statut protecteur du salarié. Il en résulte que le juge judiciaire, quand bien même le licenciement ultérieur du salarié a fait l'objet d'une autorisation administrative, demeure compétent, sans porter atteinte au principe de la séparation des pouvoirs, pour apprécier la validité de la rétractation de la mesure de licenciement, notifiée antérieurement. (Cass soc., 23 novembre 2022, pourvoi n° 20-19961)
Il appartient au salarié, investi de la mission de conseiller du salarié, qui réclame, à ce titre, la rémunération du temps passé hors de l’entreprise, pendant les heures de travail, de remettre à son employeur les attestations correspondantes des salariés bénéficiaires de l’assistance. (Cass soc., 23 novembre 2022, pourvoi no 21-18814)
Requalification des CDD
La sanction du défaut de transmission ou de transmission tardive du contrat à durée déterminée, assimilés à un défaut d’écrit, est la requalification de la relation contractuelle en contrat à durée indéterminée que, sauf fraude, seul le salarié peut revendiquer. (Cass soc., 23 novembre 2022, pourvoi no 21-16221)
Le délai de prescription d’une action en requalification d’un CDD, conclu afin d'assurer le remplacement d'un salarié absent, en contrat à durée indéterminée, fondée sur l’absence d’une mention au contrat susceptible d’entraîner sa requalification, court à compter de la conclusion de ce contrat. (Cass soc., 23 novembre 2022, pourvoi no 21-13059).